AVION (PAS-DE-CALAIS) – Jeudi 11 mai, veille de Lens-Reims (2-1), Loïs Openda a été pris plusieurs fois en excès de vitesse à La Gaillette, surpris les deux bras déployés à faire le planeur sur les pelouses d’entraînement du club artésien. L’international belge était en répétition, soucieux de soigner une impeccable chorégraphie de célébration en compagnie de ses partenaires sang et or.
« Ça fait pas mal d’années que je suis resté le meilleur buteur du club en D 1 et qu’aucun joueur n’en avait mis 19 (comme Openda cette saison), explique l’ex-avant-centre artésien Roger Boli (20 buts lors de la saison 1993-1994). J’avais envie de voir des gars s’éclater. Pour tout dire, je ne m’attendais pas à ce que ce soit Loïs. Alors, je lui ai récemment demandé deux choses. Qu’il inscrive ces 20 buts en Championnat. Et sur son 20e, qu'il me promette de faire l’avion, comme je le faisais lorsque je célébrais mes buts.» Ses coéquipiers en attestent. En ce moment, Openda est intenable. Sa force de frappe, sa vitesse et son efficacité doivent aider Lens au classement cet après-midi au Moustoir (17 h 05). « Ses débuts ont été un peu timides mais je sentais sa détermination, se souvient encore Boli. Il ne jouait pas facile. Restait plutôt dans le combat. Mais sa particularité, c’est qu’il faisait preuve d’abnégation. C’est important pour un attaquant qui porte sur ses épaules le coût de son transfert (10 M€ jusqu’en juin 2027). Il a pris de la confiance et a énormément travaillé. Au point de devenir un autre joueur. Techniquement, tout est désormais fluide. Ses contrôles orientés. Il donne, sert ses partenaires. Il offre des solutions avec une vitesse incroyable. C’est devenu impressionnant quand ça dure quatre-vingt-dix minutes ou plus. Devant son public, il est presque inarrêtable. Il donne des solutions à son équipe si elle est en difficulté. Elle le cherche. »
Openda bluffe les anciens attaquants lensois qui l’ont adoubé. « C’est un félin dans ses prises de balle et ses dribbles, estime l’ancien champion olympique sang et or Daniel Xuereb (1981-1986). Il est bien placé, fait de bons appels et reste en mouvement. C’est un avant-centre complet. J’aime beaucoup sa capacité à se positionner en pivot ou à alterner en prenant la profondeur. Dès les premiers matches, j’ai compris qu’il allait faire une bonne saison. Il s’est acclimaté assez vite au jeu lensois et bénéficie de la récupération haute du ballon. Il va faire une belle carrière s’il échappe aux blessures. Parce que les défenseurs vont user de tous les moyens pour l’arrêter. »
Mais c’est justement cette dépense d’énergie, cette mobilité sur lesquelles s’appuie son équipe. « Quand il décroche ou fait des appels à vide, il libère des espaces car c’est à l’adversaire d’aller le chercher, soit avec un défenseur ou un milieu, analyse Antoine Sibierski, 26 buts en 108 matches avec Lens (2000-2003). Malgré ce profil énergivore, il reste lucide et adroit pour marquer du droit, du gauche ou de la tête. Parce qu’il a un instinct de buteur qui n’est pas content quand il ne marque pas. Franck (Haise, entraîneur de Lens) a été bon dans son management avec lui cette saison en le mettant sur le banc un court moment. Le joueur a été réceptif à ses attentes. Cela prouve son intelligence.» Et sa capacité à beaucoup progresser à l’âge de 23 ans.
« C’est carrément une bonne pioche, admet Chérif Oudjani, buteur lensois des années 1980. Il se révèle cette année. Avant, il était brut. Seule l’accumulation des matches pouvait le faire évoluer. Il ne marque plus seulement des buts de rupture. Il passe au premier poteau devant l’adversaire. Il dispose de toutes les qualités d’un attaquant moderne. Le plus dur reste de confirmer. Car les clubs étrangers viendront se servir dans le Championnat de France. » « Il aura des propositions cet été, confirme Anto Drobnjak, meilleur scoreur de Lens (14) la saison du titre de champion (1997-1998). Parce qu’il est pour beaucoup dans cette deuxième place. Et qu’il peut jouer dans n’importe quel club au niveau où il est.»
« Rester une saison de plus serait cohérent pour son choix de carrière et finaliser sa progression, espère Boli. Il a encore à apprendre à Lens. Après il pourra aller où il veut.» « Moi, je trouve qu'il est malin avec sa double accélération et qu'il a prouvé des choses, notamment avec la Belgique (8 sélections, 2 buts), conclut Daniel Moreira, unique buteur en finale de la Coupe de la Ligue 1999 contre Metz (1-0). À 23 ans, on est mûr. Et lui a un fort caractère. C'est le club qui décidera mais, s'il dispute la Ligue des champions, il est vrai qu'il pourra encore plus se montrer. »