Y_chti Posted May 9, 2014 Report Share Posted May 9, 2014 (edited) Article Le Monde - 09 Mai 2014 http://www.lemonde.f...13032_3242.html En juillet 2013, Gervais Martel a repris les rênes du Racing Club de Lens après les avoir lâchées, un an auparavant. Celui qui était devenu président des « Sang et Or » en 1988 peut valider son retour parmi l'élite en cas de victoire contre Brest, vendredi 9, lors de la 37e journée de Ligue 2. Vous êtes actuellement troisième de Ligue 2 et proche de la montée parmi l'élite. Comment expliquez-vous les bonnes performances de votre équipe cette saison? La réponse est relativement simple. On sort de quatre années catastrophiques depuis la première descente, en 2008. Allez chercher Antoine [Kombouaré, l'entraîneur des « Sang et Or »], c’est un signe fort. Je le voulais dès le début de saison. Le bon début de saison, les bons résultats, une équipe offensive, qui se donnait à fond : tout cela a créé le buzz. C’est quoi un club qui marche ? C’est une équipe cohérente, un entraîneur, des joueurs cohérents dans leur comportement, sur le terrain et en dehors, et avoir un public derrière qui les accompagne. Le public de Lens doit nous permettre de donner le coup de collier pour réussir. On a de la chance que cet amalgame se soit fait cette année. Il y avait une attente très très forte de la part de supporteurs, qui voulaient revoir Lens à nouveau respectable et retrouver via les résultats une certaine dignité. C’est ce qui se passe actuellement. Mais on ne s’emballe pas. Parce que d’abord Antoine, ce n’est pas un mec qui s’emballe. En vingt-cinq ans, j'ai appris qu’il fallait aussi relativiser. Il ne faut pas être excessif. Il y a certaines marches à monter par rapport aux objectifs qu’on veut avoir dans nos petites têtes. On les a peut-être pas confiés à tout le monde. Sauf l’objectif de monter en Ligue 1. Les derniers mois ont été difficiles… Vous n'avez gagné que quatre rencontres depuis début mars. On a une Ligue 2 qui joue très bien au football. Et sans faire injure à personne, il y a une vraie différence de rythme avec la Ligue 1. En Ligue 2, ça joue sans arrêt avec des scores incroyables, avec des clubs qui peuvent gagner contre n’importe qui, à n’importe quel moment. La preuve en est : on réalise de bonnes performances à l’extérieur et on piétine à domicile. Il y a 6 à 7 équipes qui pouvaient monter. Les observateurs disent que c’est un très grand cru en Ligue 2 cette saison. Tant mieux pour le spectacle, l’indécision, le suspense. J’espérais que que vers le 15 avril, on commencerait à y voir plus clair. Vous êtes-vous dit que vous reviendriez aux commandes du RC Lens lorsque vous avez quitté le club, en juillet 2012 ? Je me suis toujours dit que j’allais revenir. Cela m’a permis aussi de réfléchir pendant un an à mes erreurs. Je ne me suis jamais défaussé de ça. Un président, il n’est pas là que pour parler de 98, il est là pour assumer tout ce qui a été fait. Donc cela m’a permis de réfléchir pendant un an. Je me suis demandé comment Lens avait connu ces moments-là. On peut dire toutes les conneries qu’on veut, l'élément financier est primordial. La descente en Ligue 2 a été fatale pour un club structuré comme nous qui était taillé pour être dans les cinq premiers du championnat de 98 à 2007. C’est comme si on avait la meilleure bagnole du monde et qu’on avait oublié de mettre les pneus. C’est injouable. On a dû faire face à ça : l’élément financier. Ensuite il y a eu les hommes. Il y a eu une réflexion sur une « restructuration » au niveau de la direction du club. L’élément fondamental est d’avoir quelqu’un qui ait réussi aussi dans des passages difficiles. Du National à la L2 à Valenciennes, de la L2 à la L1 et puis réussir au PSG : quand Antoine quitte Paris (en décembre 2011), le PSG est premier du championnat. C’est quand même pas rien. Il connaît la région et a un certain nombre de valeurs. J’avais déjà essayé de le faire venir il y a deux ou trois ans. Tout ça m’a permis d’avoir le recul nécessaire qu’on n’a peut-être pas quand on est dans le feu de l’action en permanence. Souvent, on est poussé par le vent quand ça marche bien. Mais quand ça marche mal, on est poussé par la tempête. Ça veut dire qu’on ne prend pas assez le temps de poser les valoches et de faire un arrêt sur image et de réfléchir. Cela m’a permis de regonfler mes batteries ou de remettre de l’oxygène dans les bouteilles. Cela ne m’empêchait pas de suivre l’équipe. Après, c’est l’avenir qui nous dira si on a bien fait. Pour l’instant, il n’y a rien qui va mal. Dès votre départ du club, en juillet 2012, vous vous êtes mis en quête d'un repreneur… D’abord, il fallait trouver un actionnaire qui avait, tant qu'à faire, de l’argent. J’ai rencontré des farfelus, des gars qui m’ont fait déplacer dans des endroits impossibles pour rien. Donc il m’a fallu du temps, de la chance, du travail, avec les gens comme Jocelyn Blanchard (le directeur sportif), Jean-Pierre Papin (ex-entraîneur du RC Lens), Olivier Dacourt (joueur lensois en 1999-2000) avec qui j’étais la première fois où on a été à Bakou [en septembre 2012]. A Bakou, maintenant, j’ai un visa permanent. Donc j’y vais souvent avec Hafiz (Mammadov, actionnaire du club depuis juillet 2013). Je sais que pour lui la politique des jeunes est essentielle. C’est un peu la raison pour laquelle il a voulu nous accompagner. Faut avoir envie d’aller dans un club de Ligue 2. Mais nous, on est Lens. Si on est en là, c’est qu’on a mérité d'y être. Point final. A Lens, il y a des infrastructures, une situation géographique extraordinaire, le Musée du Louvre qui est ouvert, les supporteurs. C’est quand même fabuleux. Je connais mon club par cœur. Je savais que j’étais en capacité de pouvoir remettre le club sur les rails tout en étant accompagné par un actionnaire intéressant. Comment avez-vous rencontré Hafiz Mammadov? Je l’ai rencontré par hasard. J’étais avec un ami dans le sud de la France. On a sympathisé très très vite, il connaissait Lens et connaissait mon parcours. Il connaît bien le football. Il est le sponsor de l’Atlético Madrid. C’est un gars qui est passionné par son club du FC Bakou. Il a fallu le convaincre de venir en L2. A cet échelon, il suffit de mettre une allumette et on a le brasier tout de suite avec les supporteurs. C’est le message qu’il a entendu tout de suite. C’était fondamental pour moi. Comment l'avez-vous convaincu d'investir dans le RC Lens? En disant qui on était, donc en nous servant du passé, de ce qu’on a fait et ce qu’on pouvait redevenir. Après il y avait plein de choses : la rénovation du stade Bollaert qui accueillera l'Euro 2016, le Musée du Louvre qui arrivait, le bassin de population qui est énorme, la situation géographique de Lens, à côté de Paris, à côté de Bruxelles. C'est un arrondissement qui est très touché socialement. Mais c'est une force. Quand j’expliquais à Hafiz que le kop était en face et qu’on avait des places populaires (à 3 euros le match) que je souhaitais garder, tout de suite j’ai eu quelqu’un qui était à l’écoute à 100 %. J’ai argumenté, bien entendu. Mais après, ça s’est fait dans le temps, par des visites à Bakou, des explications, des présentations. Il est venu ici en novembre voir un match contre Châteauroux. Il s’est rendu compte de visu même s’il avait tous les éléments, toutes les vidéos de présentation du club. Avez-vous dû effectuer un travail d'explication auprès des élus locaux pour justifier l'arrivée de ce nouvel investisseur ? La France est toujours en train de chercher ou d’inventer des choses. J’ai vu un reportage sur Canal+ qui est nul. On fait une présentation de Mammadov à 4 heures du matin… Mammadov, c’est quelqu’un de très sympa avec les gens. C'est quelqu'un de très abordable quand on est dans ses bureaux là-bas, à Bakou. C’est un gars qui bosse tard parce qu’il y a le décalage horaire, c’est un gars qui bosse beaucoup avec la Bourse de New York. Il tire sa richesse du pétrole et du gaz. L’explication est là. L’explication est là. Ce sont des gens qui travaillent tard le soir. Cela reste un gars qui est totalement abordable. Les gens du club l’ont bien vu quand il est venu visiter ici le Musée du Louvre, etc. J’ai bien sûr expliqué qui était Mammadov, ce qu’était le pays, etc. Mais j’ai pas eu besoin d’expliquer beaucoup. Vous savez, l’Azerbaïdjan a pignon sur rue en France. Il y a l’ambassade d’Azerbaïdjan à Paris. L’épouse du président de la République d'Azerbaïdjan a été mécène par rapport à des musées en France. Je trouve qu’on raconte beaucoup de choses sur l’Azerbaïdjan. On aurait pu en faire autant pour d’autres pays qui aident le foot et d’autres pans de notre économie. J’ai été un peu surpris. L'Azerbaïdjan avec Lens, le Qatar avec le PSG, Monaco avec le Russe Dmitri Rybolovlev : les clubs français comptent davantage d'actionnaires étrangers… Ecoutez, à part Lagardère à un moment donné, qui n’a malheureusement pas réussi avec le Matra, et Dreyfus à Marseille, qui a mouillé le maillot, c'est compliqué de trouver des gens qui investissent dans le foot français. Le foot a toujours une image sulfureuse. Pourquoi ? Parce qu’on est un sport populaire. Il y a dix fois plus de personnes dans les stades de foot que dans ceux de rugby. Mais lorsqu’on attire une majorité de personnes, on a évidemment plus de risques d’avoir quelquefois un certain nombre d’incidents, de hooligans, etc. Sauf qu’on oublie une chose : le foot reste « number one » par rapport à ce que les gens aiment. Il suffit de regarder les audiences de la Ligue des champions, de la Coupe du monde. Sauf que les entreprises françaises, pour des raisons peut-être d’image — je vais en vexer quelques-uns, mais c’est pas grave j’ai passé l’âge — de snobisme bourgeois, préfèrent peut-être plus le rugby que le foot. Je veux leur dire que c’est une grosse erreur. Vous demandez demain matin qui est le demi d’ouverture de l’équipe de France de rugby, on saura pas vous dire. Si on vous demande qui c’est Ribéry, ou untel, on va vous répondre. C’est le foot. Il a ses excès, car il est tellement exceptionnel au niveau mondial, il a ses attraits, mais il est incontournable. Ici, j'ai des partenaires commerciaux qui viennent et pour qui j'ai beaucoup de respect. J’ai des partenaires à 5 000 euros à Lens, pour moi ils sont aussi importants que ceux qui mettent 300 000 euros de par leur fidélité, leur soutien indéfectible. On est en train de les reconquérir, on en a perdus beaucoup. C’est logique avec nos résultats. Moi je suis heureux d’avoir aujourd’hui 350 partenaires à Lens, j’espère en avoir quatre cents la saison prochaine. Sur quoi repose le partenariat entre Lens et l'Azerbaïdjan? Avec les jeunes notamment. On a notamment deux gamins azéris qui vont être autorisés à jouer en juin. J’espère que les deux mettront un jour le maillot de Lens. C’est ça aussi les échanges. On a été inaugurer, poser la première pierre du lycée français à Bakou. L’Azerbaïdjan est un pays tout neuf, qui veut s’ouvrir sur l’extérieur, qui va organiser les premiers JO d’été européens (à Bakou), on a les Championnats du monde de judo en juin à Bakou, on a la candidature de Bakou pour accueillir des matchs de l’Euro de foot 2020. L’Eurovision a eu lieu à Bakou il y a deux ans. Ce sont des pays qui émergent, qui arrivent. Nous, on aurait été cons de ne pas signer avec Hafiz, parce que d’autres l’auraient fait. Tous les Français auraient soutenu le PSG s'il avaient été en finale de Ligue des champions. Et moi le premier. Il y a trois ans, tout le monde dégueulait sur Paris. Et si derrière des gens arrivent comme Mammadov, le mec de Monaco, le mec de Paris, c’est un plus pour le foot français, puisque avant on était toujours considérés comme des cancres. On en pique plus une depuis la finale de l’OM (en 1993), on se faisait critiquer parce qu’en Ligue Europa, on n’est pas bons mis à part Lyon [quart-de-finaliste cette saison]. Vous allez voir qu'on va dire que le foot français est en train de revenir au niveau. Guy Roux [éphémère entraîneur de Lens en 2007] — qui de temps en temps dit des bêtises mais parfois dit des choses vraies — disait « on est devenu le football bulgare ou roumain ». Eh ben avec Paris, avec Monaco, Marseille s’ils reviennent, Lyon pourquoi pas ?, Lens à un moment donné, vous allez voir que tout le monde va être fier d’être derrière ces clubs-là. Quels objectifs vous a-t-on fixés à Bakou ? Votre actionnaire azéri a sûrement des ambitions européennes… Bien sûr qu’on en parle. Sur le court terme, on l’a jamais dit à l’extérieur. Mais vous pensez bien que quand je vais chercher Antoine Kombouaré, et que je l’amène à Lens, c’est pas pour gagner la Coupe d’Artois. On a du chemin à faire. Mais on ne va pas le faire à coup de dizaines de millions d’euros. On va le faire tranquillement. Si on arrive à monter, on va essayer de faire bonne figure en L1. Et garder nos valeurs et ne pas se croire arrivés parce qu’on est remontés en L1. C’est compliqué, on va jouer 38 matchs à l’extérieur. On n’a pas de stade pour l’année prochaine à cause des travaux. On ne sait pas encore où on va jouer. Il y a un plein de paramètres qui paraissent défavorables. Mais qui, au contraire, peuvent nous ressouder les uns les autres. Ça, c’est encore une difficulté supplémentaire. Mais tout ça, c’est passionnant, parce que ça va se faire à la force du poignet. Ça va se faire avec des convictions. Mais il n’y a rien de plus beau au monde, de réussir, de se donner des challenges comme ça sans avoir plus grands yeux que grands ventres. Quel était le budget du RC Lens cette saison ? Vingt-deux millions d’euros. On a une masse salariale qui est de 6,2 millions d’euros, qui reste bien placée en L2 et qui reste très très loin des masses salariales des quatre premiers de L1. De quels dirigeants êtes-vous le plus proche aujourd'hui? Il y a eu beaucoup de changement dans le foot français. Il y a beaucoup de gens qui sont arrivés comme nous on est arrivés à un certain moment. Je garde évidemment plus de relation avec des gens anciens que j’ai côtoyés. J’ai un peu l’air d’un ancien combattant mais je suis arrivé à 33 ans comme président de Lens. C’est sûr qu’il y a des gens que je fréquente depuis vingt-trente ans, comme Louis Nicollin (Montpellier), Carlo Molinari (vice-président du FC Metz), Jean-Michel Aulas (patron de l'OL), un certain nombre. Je me concentre plus sur Lens maintenant. On m’a refusé d’entrer au comité directeur de l’UCPF [union des clubs professionnels de football] ainsi qu’à la Ligue sous prétexte qu’il fallait un an de présence. Ce qui est, mais c’est la France, totalement débile. En ayant été président pendant vingt-quatre ans… J’accepte. Moi je suis très respectueux des règlements, donc bon… il n’y a pas de problème. Alors on leur envoie des mails pour leur dire ce que je pense. Qu'ils soient contents ou pas, je dis ce que je pense. Sur l’affaire de Monaco, on est passé complètement à côté de nos pompes au début. On prend un accord avec Monaco, on revient dessus. Alors que ça fait soixante-dix ans qu’on joue avec Monaco avec ces règlements — bon ils sont discutables —, donc évidemment on se réveille maintenant parce que Monaco est deuxième du championnat. Monaco et Paris vont, j’espère, faire beaucoup grimper les droits télés en France. Je pense que les présidents dans leur ensemble défendent souvent leur chapelle sans se poser les vraies questions. Si on se posait les vraies questions, on se demanderait pourquoi on a laissé descendre Lens en 2008, alors que c’est Grenoble qui devait rester en L2 qui avait des comptes qui étaient trafiqués. La preuve en est que deux ans après ils ont déposé le bilan. Cet effort-là, il n’a été fait par personne pour garder Lens l’année dernière. Moi, j’ai pas attaqué, parce que j’ai été respectueux des institutions. J’aurais pu le faire… C'est un regret ? C’est un regret que j’ai de ne pas avoir attaqué. Mais, moi, je suis capable de gueuler mais je ne suis pas un mec qui fait de la polémique pendant quarante ans. Donc aujourd’hui, s’il y avait une notion de responsabilité plus importante, on s’intéresserait beaucoup plus à comment on fait pour aider les gens qui descendent et qui ont de véritables structures. C’est pas normal qu’un club comme Le Mans ait disparu, pas normal que Le Havre soit dans la difficulté aujourd’hui, alors que ce sont des clubs qui ont fait des efforts extraordinaires en termes d’infrastructures et pour leur stade. Ce n’est pas normal qu’il y ait des clubs qui montent en L1 et qui n’ont pas de centre de formation, et qui redescendent en ayant pris les droits télés. Je ne les critique pas, parce qu’en 2006 j’avais le même raisonnement. On se dit le cancer, ça n’arrive qu’aux autres. Mais quand on a les mains dans le cambouis et quand on a le cancer, on se dit merde. Parce que l’histoire de Lens (qui a vécu deux descentes), on a quand même fait fort ; elle arrivera dans les années qui viennent à des clubs respectables, à des gros clubs. Et vous verrez qu’à ce moment-là, on arrivera peut-être à changer les règlements. Si demain, on devenait plus un pays d'action, on essayerait de se rassembler pour se demander : « Voilà, quel est notre objectif, qu’est-ce qu’on veut faire dans trois, quatre, cinq, dix ans du foot ? » Là, je crois qu’on avancerait très fort. On a déjà posé des choses comme les états généraux du foot (en 2010). Mais ça a donné quoi ? Qu’est-ce que ça donne ? L’histoire de Glavany, pour qui j’ai du respect et qui connaît bien le foot et avec qui j’ai du plaisir à parler de foot, qu’est-ce que ça a donné sa commission ? Que dalle ! Aujourd’hui, on met une taxe à 75 %. Bon soit… Derrière, quelle est l’avancée ? On n’est pas sur de véritables débats. Mais, moi, peut-être que j’ai passé l’âge et l’envie d’aller me battre sur ça. Moi, j’ai qu’une envie : c’est de me battre sur Lens. La fonction de président de club a-t-elle changé ? Le job a changé dans le sens où l’idée du président de club qui décide de tout, comme j’ai pu le faire à un moment donné, est finie. J’ai fait des conneries. C'est naturelle quand on prend toutes les décisions. Il n’y a que le mec qui est sur sa chaise qui ne se trompe pas. Aujourd’hui, on est obligé d’avoir une structuration importante au niveau économique sur le club, au niveau des dirigeants, qui permet de n’avoir pas une pensée unique, mais d’échanger ; une structuration du type « chacun dans son domaine ». On essaye de n'être pas submergé dans le domaine de la communication. On est en 2014… Quand on voit ce qui se passe : les tweets, etc. Donc il faut qu’on arrive à maîtriser, il faut qu’on ait des gens compétents. Dans le commercial aussi. Le temps où on me demandait : « C’est bien Lens, vous pouvez pas me filer 10 000 balles ? », c’est fini tout ça. Il n’y a plus personne qui touche une somme pareille pour rien. Et puis en plus il y a une concurrence qui est de plus en plus forte. Les centres de formation par exemple : si on se remet quinze, vingt ans en arrière, quand on avait un centre qui tenait la route, et on était quelques recruteurs. Aujourd’hui, il y a une bagarre permanente. Il y a des gens des grands clubs français qui sont là en permanence pour voir jouer mes équipes de 17 et 19 ans. Moi aussi d’ailleurs. La pénétration et la présence du foot dans nos vies de tous les jours, c’est incroyable comme ça a changé depuis vingt ans ! Je vais parler encore une fois comme un vieux con. Aujourd’hui, il n’y a pas une journée sans qu’il n’y ait une émission de foot, les spécialistes, les « rigolos », les « champions », les commentateurs d’après-coup. Les matchs, moi, je me régale, ma femme est folle. Heureusement qu’on a deux Canal Sat et BeIN. On a tous les championnats étrangers, on a aujourd’hui une puissance avec Internet. Pour aller voir un joueur avant, on allait le voir jouer en Pologne, etc. Là, on clique sur un joueur, on voit ses statistiques pour ses dix derniers matchs. Il faut être professionnel, mais garder la passion. Dieu merci, malgré mes 59 balais, pour moi c’est intacte ! Cela consiste en quoi d'être président du RC Lens? J'ai autant de respect pour le supporteur qui paie sa place en abonnement 3 euros que pour celui qui a plus de moyens et qui peut mettre 60, 70 euros. Aujourd’hui, le RC Lens est un mélange réussi de la société française de 2014. J’ai des gens de tous bords. J’ai l’habitude de le dire quand je suis invité dans les discours dans les mairies. Moi, j'ai dit que je ne ferais jamais de politique, parce qu’être président de Lens, ça veut dire être président de tout le monde. De droite, de gauche, des petits, des gros, des gens riches, de ceux qui n'ont pas une thune… et on se bat pour eux aussi… c’est pour eux seuls que j’ai la fierté de présider Lens — qui est un club fantastique — depuis vingt-cinq ans, mais dont le tome 2 va s’écrire dans les années à venir. Le tome 1, on l’oubliera pas, mais c’est comme les séries à la télé, quand vous regardez le première épisode de Braquo, vous avez envie de regarder le deuxième épisode. C’est pareil au foot. Etes-vous nostalgique de 1998, l'année où le RC Lens décrocha le titre de champion de France ? La « nostalgie » ? C’est un mot que je ne connais pas. Je suis toujours stupéfait par les gens qui reparlent sans arrêt du passé. Le passé, je l’ai dans ma tête et sur les photos ou vidéos. Je n’ai même jamais regardé tout ce qui est passé à la télé et tout ce qui a été enregistré sur le titre de 98. C'est-à-dire que le match Auxerre-Lens, bien entendu, je l’ai chez moi. Et tout ce qui a été filmé à Lens, je ne l’ai jamais regardé. Je regarderai ça quand je serai vieux… je commence à l’être un peu… mais je regarderai ça avec mes petits-enfants lors des longues soirées nordistes. Je ne suis pas nostalgique… j’ai le respect du passé… je suis quelqu’un qui me projette toujours vers l’avenir. A force de regarder tout ce qui se passe derrière, on finit par rentrer dans celui qui est devant. C’est comme en bagnole. Les supporteurs ont raison d’être nostalgiques. Moi, je suis président du RC Lens en 2014. Les supporteurs de Lens ont tellement été déçus depuis quatre ou cinq ans… je ne m’amuse pas et je n’aurai pas l’indécence de leur dire « souvenez-vous de 98 ou 99 ». Cela fait partie de l’histoire du club, c’est respectable, c’est dans nos têtes et sur l’écusson du RC Lens. Maintenant ce qu’il y a à écrire, c’est une nouvelle page. Cette nouvelle page passe par de bons résultats dans les semaines à venir. Moi, je fonctionne comme ça. C’est un grand moment de ma vie. Heureusement, j’ai eu la chance d’être relativement en bonne santé et je suis totalement projeté sur ce qu’il se va se passer demain et après-demain. Rémi Dupré Journaliste au Monde Edited May 9, 2014 by Y_chti Quote Link to comment Share on other sites More sharing options...
coconuts Posted May 9, 2014 Report Share Posted May 9, 2014 Martel, le roi de la métaphore ! Pedro 1 Quote Link to comment Share on other sites More sharing options...
Tiger Posted May 9, 2014 Report Share Posted May 9, 2014 Il n'y a pas a dire, il a toujours été très très fort pour donner de l'espoir aux gens. Et meme si on s'est fait avoir plusieurs fois, personnellement j'y crois toujours a ces belles paroles. En même temps, il est convaincu et quand on est convaincu de quelque chose, tout le monde adhère. En espérant ne pas se faire avoir ue nouvelle fois. Belle interview ! Quote Link to comment Share on other sites More sharing options...
Md-rax Posted May 9, 2014 Report Share Posted May 9, 2014 (edited) c'est un sacré orateur, mais son discours est à chaque touchant, donc on vraiment envie d'y croire. sinon: Si on se posait les vraies questions, on se demanderait pourquoi on a laissé descendre Lens en 2008, alors que c’est Grenoble qui devait rester en L2 qui avait des comptes qui étaient trafiqués. La preuve en est que deux ans après ils ont déposé le bilan. Cet effort-là, il n’a été fait par personne pour garder Lens l’année dernière. Moi, j’ai pas attaqué, parce que j’ai été respectueux des institutions. J’aurais pu le faire… Il y a quand même de quoi avoir des regrets quand même .... surtout comment la DNCG fait son taf (trop?) aujourd'hui .... Même si on méritait de descendre, la chute a quand été bien plus douloureuse pour nous que pour un banal club de fin de tableau de L1 Edited May 9, 2014 by Md-rax Quote Link to comment Share on other sites More sharing options...
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